Les récentes fermetures d’usines de papier et de carton aux États-Unis, ainsi que les difficultés persistantes en France et au Québec, mettent en lumière une fragilité structurelle : l’équilibre entre la collecte croissante de carton recyclé et la capacité industrielle à le transformer.
États-Unis : une capacité en recul
Depuis le début de l’année, plusieurs fermetures ont été annoncées. International Paper a fermé quatre sites en 2025, dont deux en Géorgie, supprimant plus de 670 emplois et réduisant significativement sa capacité de production de carton ondulé (containerboard). Selon diverses estimations, il s’agit de plusieurs centaines de milliers de tonnes de capacité perdue, voire plus d’un million si l’on inclut l’ensemble des arrêts annoncés cette année.
Smurfit WestRock a également fermé ses usines de St. Paul (Minnesota) et Forney (Texas), tandis que Graphic Packaging International a cessé ses activités à Middletown (Ohio). Ces décisions privent les centres de tri et les transporteurs de débouchés locaux pour leurs ballots de vieux cartons ondulés (OCC), les obligeant à chercher de nouveaux clients, parfois à l’international, ce qui renchérit les coûts et allonge les délais.
France : excédent de papier-carton collecté
En France, la fermeture de l’usine papetière de Chapelle-Darblay, arrêtée depuis 2020, reste un symbole. Spécialisée dans le recyclage des papiers graphiques, elle absorbait jusqu’à 350 000 tonnes de fibres récupérées par an. Malgré un projet de reprise soutenu par l’État en 2025, le site n’a pas encore redémarré.
Selon le ministère de l’Économie, entre 1 et 1,5 million de tonnes de papiers et cartons collectés chaque année en France peinent à trouver des débouchés industriels locaux. Une partie doit être exportée, tandis que d’autres volumes sont stockés, ce qui fragilise la rentabilité de la filière.
Québec : collecte modernisée, mais débouchés restreints
Au Québec, la collecte sélective est performante et a été renforcée par la réforme du système gérée par Éco Entreprises Québec (EEQ). Toutefois, les débouchés locaux demeurent limités : peu d’usines papetières acceptent les ballots de papier mixte issus des centres de tri. Résultat : une partie des matières doit être exportée, ce qui engendre des surcoûts pour les municipalités et les recycleurs, comme l’a souligné Recyc-Québec dans ses plus récents rapports.
Une filière à renforcer
Partout, le constat est le même : la croissance du commerce en ligne et de la distribution génère toujours plus de cartons à recycler, mais les fermetures d’usines réduisent la capacité de traitement. Les experts recommandent des investissements dans de nouvelles capacités locales, une amélioration de la qualité des ballots collectés pour limiter les refus, et une diversification des marchés afin de réduire la dépendance à quelques sites majeurs.