Bien plus que le dépoussiérage

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Les drones débarquent en usine. Ils sont sécuritaires, efficaces, économiques et faciles à utiliser.

Lors du récent événement virtuel Tissue Talk organisé par Valmet, les participants ont pu jeter un coup d’œil sur le potentiel des drones à l’intérieur d’une papetière. Les drones sont déjà utilisés dans l’industrie mais surtout dans des applications extérieures comme dans la supervision en forêt. Dans sa présentation intitulée “High-flying multi-tool keeps the production environment safe and clean,” Paul Arnold, directeur, Solutions en papier tissu pour le sud de l’Europe, le Moyen-Orient et l’Afrique, a démontré l’usage des drones à l’intérieur d’une usine.

SI la présentation a porté plus particulièrement sur le nettoyage étant donné les dangers de la poussière dans les usines de papier tissu, M. Arnold a bien voulu s’entretenir avec Tissue360° du vaste potentiel des drones, même s’il reste encore beaucoup à faire dans le domaine.

Pour Valmet, l’idée a germé il y a trois ans lorsque la compagnie a voulu produire une vidéo commerciale sur ses installations de mise en ballot de la pâte. La zone en question, totalement fermée, a incité l’entreprise à recourir à des drones pour une vue plus aérienne des lieux. 

« Lorsque nous avons commencé, commente M. Arnold, nous nous sommes aperçus que tout était recouvert de poussière. » Heureusement le ''pilote'' du drone pouvait enlever la poussière, ce qui fut fait en moins de 5 minutes par déplacement d’air par les hélices du drone. « Ca nous a impressionné, » ajoute M. Arnold.

Le directeur de la ligne de conversion a vu ces résultats et demandé si on pouvait faire la même chose dans son département. Habituellement les activités de nettoyage y monopolisent deux travailleurs pendant huit heures. Le drone a réalisé le travail en 10 minutes. L'usine a alors demandé à Valmet si on pouvait adapter un drone pour usage industriel.

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Pour M. Arnold, l’objectif premier était de voir si on pouvait enlever les particules de poussière dans les endroits mal placés, comme les conduites de ventilation, les poutres et les câbles. Rappelons que dans une usine de papier tissu, la poussière augmente les risques d’incendie et peut aussi causer des bris de feuille, et même contaminer les produits finis. La question de l’accessibilité des lieux constitue aussi un défi pour les employés. Règle générale, on procède à un nettoyage chaque semaine sur une ligne de conversion et à tous les trois mois dans un bâti de machine à papier. Et cela exige l’arrêt de la production.

DÉFIS À RELEVER

L’environnement intérieur industriel comporte certains défis pour un drone. Les risques d’accidents et d’écrasement sont nombreux. De plus, la fonction de GPS ne fonctionne pas à l’intérieur, ce qui peut en compromettre la stabilité. La poussière nuit également au fonctionnement des capteurs de plancher. Ces deux derniers outils ne fonctionnent donc pas à l’intérieur. De plus, selon M. Arnold, « les normes de sécurité ne concernent pas les drones et il nous a fallu réfléchir sur l’obtention de contrôles fiables. Qu’allait-il arriver si quelque chose ne se passe pas bien? »

Ajoutons à cela que les drones industriels ont une conception différente. Valmet fait affaire avec deux partenaires en France. L’un se spécialise dans la fabrication de drones. L’autre, plus orienté sur les services, travaille sur les réseaux GPS. Ces drones sont encastrés dans une cage protectrice en fibre de carbone. Comme le fait remarquer M. Arnold, les possibilités sont infinies pour un drone d’abimer des tuyaux, des conduites, des câbles ou autres structures, sans compter les dommages infligés au drone lui-même. Il existe deux types de clients, selon M. Arnold. Le premier désire souffler continuellement sur la poussière pour en éviter l’accumulation et réduire les risques d’incendie. Dans ce cas, un drone équipé d’une soufflante accomplira la tâche. Pour les autres, la solution passe par un vacuum et une certaine accumulation de poussière reste acceptable. Ce genre de drone est alors équipé d’un canal de suction relié à un collecteur de poussière au plancher. Selon M. Arnold, de façon optimiste, un tel prototype devrait être disponible l’an prochain. Dans les deux cas, le drone est manipulé par un opérateur et son fonctionnement ne va pas à un sous-contracteur.

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Il existe deux modèles de drones : un à six hélices et un modèle plus réduit à quatre hélices. Les tailles de drones sont variées, à cause des limites d’espace en usine. Jusqu’à maintenant, des producteurs comme Kimberly-Clark, Sofidel, Essity et Wepa ont eu recours au drone. Certains clients ont commandé plusieurs fois les services d’un drone. La plupart des essais ont eu lieu en France, mais Valmet va plus loin et offre des essais. La location d’un drone est aussi une possibilité et vient avec une offre de cours de manipulation de 70 heures. Les drones accomplissent très bien le boulot. Ils atteignent et nettoient des endroits difficiles d’accès où les procédures normales de nettoyage sont impossibles. Les drones sont rapides mais pas assez au goût de certaines clientèles. « Nous examinons ce qui peut être nettoyé de façon plus rapide, soit en deux ou quatre heures, mais pas huit heures, » conclut M. Arnold.

D’INFINIES POSSIBILITÉS

Le potentiel des drones va beaucoup plus loin que le simple nettoyage. De multiples technologies ont déjà été incorporées aux drones : lecture de code-barres, scanneur 3D, capteurs, infrarouge, orthophotogrammétrie et calcul de volume. Avec des capteurs à infrarouge, M. Arnold avance que les drones peuvent survoler un plancher d’usine et analyser tout ce qui s’y trouve, par exemple les phosphates et les nitrates. Il s’agit d’une application très spécialisée. D’autres capteurs peuvent mesurer l’humidité dans un bâtiment et composer un marquage de l’environnement de l’usine. Avec la multiplication de l’automatisation des activités d’entreposage en usine, les drones peuvent survoler des palettes de bois, lire les codes-barres et relier l’information à la salle de contrôle des inventaires.

La quantité de données pouvant être amassé est immense, d’autant plus qu’avec le temps, les drones s’améliorent et leurs capacités sont décuplées. Lors de sa présentation, M. Arnold a fait part de quatre axes de développement : la stabilisation intérieure; l’aspiration de la poussière; les drones à auto-opération; et les robots spéciaux. Au sujet de la stabilité, M. Arnold souligne que des marques de radio-fréquences placées dans le bâtiment contribue à la bonne conduite du drone en usine. Mais l’objectif ultime est de produire des drones auto-opérés, ce qui pourrait survenir dès l’an prochain. Également en 2021, l’avènement d’appareil de suction sur les drones. Reste le développement de robots spéciaux. Ceux-ci sont dans une classe à part. Suivant la demande en provenance des clients, M. Arnold entrevoit un robot autonome du drone, mais les deux peuvent fonctionner ensemble.

Dans le futur, M. Arnold envisage le jour où des drones pleinement automatisés seront disponibles. Une bonne portion du coût actuel est consacrée au pilotage. « L’arrivée des drones autonomes va changer la donne, » estime-t-il. Des problèmes de structure ou de tuyautage seront repérés par les drones. Ceux-ci, au final, vont faire épargner du temps, améliorer la sécurité et réduire les coûts d’exploitation tout en améliorant l’efficacité. »


Cet article a été originalement rédigé en anglais par Graeme Rodden et a été publié pour la première fois dans le numéro AUTOMNE / HIVER 2020 de Tissue360°.
Graeme Rodden est rédacteur en chef, Amérique du Nord et du Sud, pour Paper360°, une publication officielle de TAPPI. TAPPI est la principale association des industries mondiales de la pâte, du papier, de l'emballage, des tissus et de la transformation.