MP Hygiène, pionnier de la fabrication de papier tissu avec système d’aération électrique

Historique familial : MP Hygiène a été repris du fondateur Louis-Alexis Miribel par Marc Miribel en 1992. Sa fille Laure et son fils Pierre sont aussi impliqués dans l’entreprise familiale.

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Cet article a été écrit par Tissue World Magazine et est paru dans le numéro de novembre/décembre 2022.

Déjà chef de file du marché français du papier tissu à usage industriel et commercial (Away from home – AFH), le papetier français coupera drastiquement son empreinte de CO2 grâce au démarrage d’une machine à papier AHEAD 2.2 d’ici 2024. Le reportage de Helen Morris, éditeur senior chez TWM.

MP Hygiène, usine d’Annonay. Située dans le département de l’Ardèche en région Auvergne-Rhône-Alpes, dans le sud-est de la France, la papetière se trouve dans une région reconnue pour ses forêts et ses sentiers pédestres, non loin du Pont d’Arc et des cavernes du Chauvet Pont d’Arc qui regorgent de fresques et de peintures venues tout droit de l’ère paléolitique. Le parc safari de Peaugres est quant à lui une attraction familiale pour examiner les animaux provenant de quatre continents.

Bientôt ce département sera aussi l’hôte d’une nouvelle machine à papier tissu haute vitesse et d’une grande première dans l’industrie : au premier trimestre de 2024, on procédera à la mise en marche d’une machine à papier AHEAD 2.2 de Toscotec, première machine à haute vitesse dotée d’un système d’aération électrique avec trois stades de récupération de chaleur.

« C’est un développement majeur pour nous et pour l’industrie du papier tissu en général, » observe Marc Miribel, Président et chef de la direction de MP Hygiène en entrevue téléphonique. « Non seulement cet investissement nous permettra de doubler notre capacité de produire des bobines mères, mais l’usine d’Annonay sera la première au monde à utiliser des hottes électriques pour les produire. Du coup, notre empreinte carbone sera l’une des plus petites au monde. » L’avènement d’une seconde machine à papier à l’usine d’Annonay et l’impact environnemental du projet sont le reflet de la longévité de l’entreprise et de sa ténacité malgré un climat d’affaires on ne peut plus perturbé.

TWM a d’abord rencontré M. Miribel à l’usine d’Annonay en 2015. Son enthousiasme et sa détermination en affaires transpiraient déjà de ses propos, tout comme l’humour qu’il gardait malgré tous les défis qui se dressaient devant le marché européen du papier tissu.

Fondé par Louis-Alexis Miribel en 1865 à titre d’usine de récupération de textile, MP Hygiène a été acheté par le petit-fils Miribel en 1992. Sa fille Laure et son fils Pierre sont aussi impliqués dans le business familial. Durant l’entrevue de 2015, il a souvent été question du rêve d’avoir une seconde machine à papier et de la croissance de l’usine dans le secteur du papier hygiénique. Malgré la récession de l’époque, le marché francais du papier AFH connaissait une croissance de 2-3% par année. « Le secteur papier hygiénique recèle beaucoup de potentiel, » disait alors M. Miribel. Le séchage à l’air convient moins au papier tissu, ce dernier est plus hygiénique. Et l’hygiène des mains est notre spécialité.

MPH 31janv23 2L’usine de papier tissu MP Hygiène d’Annonay : la MP AHEAD 2,2 devrait prendre son envol au premier trimestre de 2024.

Aujourd’hui, en 2022, ses commentaires sont encore plus judicieux qu’il ne l’avait prévu. « La nouvelle machine à papier nous permettra de fabriquer du papier à partir de fibres recyclées, ce qui constitue un changement significatif pour notre stratégie de produits. Étant donné la demande accrue du marché pour des solutions plus circulaires, plus durables, il était évident que nous devions investir dans le recyclage à l’usine d’Annonay, » ajoute M. Miribel.

La mise en marche de la MP 2 se fera selon une configuration électrique, l’entreprise éliminant les émissions directes de carbone liées au procédé de séchage. La hotte est équipée du plus récent design de presse à sabot TT NexPress et du séchoir Yankee TT SYD en acier. Les hottes TT sont munies de brûleurs au gaz et de radiateurs électriques.

Le démarrage de la MP 2 fera bondir la capacité de production de papier tissu de l’entreprise de 38 000 tonnes/année. « Notre première usine, avec sa MP 1, a une capacité de 30 000 tonnes de bobines mères et nous convertissons jusqu’à 45 000 tonnes/année de produits finis. Ce qui veut dire que nous achetons autour de 15 000 tonnes/année de bobines mères, surtout de l’Espagne et de l’Italie. Ce second investissement nous permettra de réduire les risques associés avec l’achat de bobines mères de d’autres pays et contribuera à faire fléchir notre empreinte carbone imputable au transport. »

MPH 31janv23 3Augmentation de production : deux lignes de conversion Gambini, une nouvelle machine United Converted, trois enrouleuses Nexus et une nouvelle plieuse Z ont récemment rejoint la MP 1.

La préparation de pâte prendra son envol au dernier trimestre de 2023 et alimentera les deux machines à papier. « La MP 2 sera mise en marche la première avec l’équipement de préparation de pâte. Nous serons en mesure de traiter 30 000 tonnes/année de papiers récupérés et l’équipement permettra de recycler tous les types de vieux papiers, y compris le carton usagé. Au lieu d’avoir une double presse comme sur la MP 1, nous travaillerons avec une presse à sabot, ce qui permettra de confectionner un papier plus doux. La MP 2 est une étape cruciale de notre développement puisque nous pourrons éventuellement nous diversifier et investir le marché domestique. »

La stratégie de MP Hygiène est d’atteindre les 65 000 tonnes/année de papier produit d’ici 2025, soit 30 000 tonnes de la MP 1 et 35 000 tonnes de la seconde machine, avec un mélange de 50% de produits recyclés. « Il existe un fort engouement sur le marché du papier tissu pour un effort supplémentaire du côté de l’environnement, de l’écologie et de la durabilité … Nous ne pourrons jamais remplacer 100% des produits de pâte pure mais certains d’entre eux peuvent passer au mélange de pâte recyclée, surtout dans le secteur AFH qui n’a pas besoin de blanchiment ou d’un degré supérieur de blancheur. »

L’usine d’Annonay a aussi investi dans un nouveau scanneur pour la MP 1 ainsi qu’un nouveau triturateur. L’entreprise a converti 43 000 tonnes cette année et travaille avec deux lignes Gambini de 12 000 tonnes chacune, une machine United Converted d’une capacité de 10 000 tonnes, deux autres lignes United Converted de 10 000 tonnes chacune et une ligne de pliage Z à être installée en 2023. Dans l’emballage, MP Hygiène a investi dans le recyclage des matières plastiques. A la fin de 2023, la capacité de conversion de la compagnie dépassera les 75 000 tonnes/année.

MPH 31janv23 4La MP 1, première machine à papier de l’entreprise : depuis son démarrage, on enregistre une croissance de productivité de 1000 à 2000 tonnes par année.

Agir localement est la clé pour MP Hygiène. La compagnie est située près des frontières italiennes et espagnoles et a toujours composé avec la compétition des petits convertisseurs italiens ainsi que des grosses pointures, dominantes en France. C’est à ce niveau que l’arrivée du Covid-19 a eu impact positif double pour les affaires.

« Nous voyons clairement des tendances positives imputables au Covid, » analyse M. Miribel. D’abord, premier impact, il existe toujours une demande importante pour le papier tissu hygiénique. La population était à la maison durant la pandémie, mais nous n’avons pas perdu beaucoup de volume dans le secteur de l’AFH et du papier à essuie-mains. La population qui continuait à sortir pour travailler se lavait les mains plus souvent. Si nous comparons nos chiffres d'aujourd'hui versus ceux de 2019, nous enregistrons une croissance dans les deux chiffres en termes de volume. Et les ventes ont encore plus progressé, étant donné le prix moyen par kilo. »

Il ajoute que le plus grand changement insufflé par la pandémie a été que la population en général se souciait plus de l’hygiène de leurs mains. « Même aujourd’hui – quoique certaines gens semblent avoir tout oublié de la pandémie – la population est plus sensibilisé à l’hygiène et cette tendance va se poursuivre pour les dix prochaines années et même plus, » ajoute-t-il.

Puis, le second impact se trouve au niveau local. « La pandémie a fait en sorte que la population se soucie plus des entreprises locales et du fait qu’acheter local, c’est investir dans une durabilité positive. Cette tendance, on la retrouve partout en France, alors que ce n’était pas le cas avant la pandémie tandis que nous devions faire face à une compétition féroce de l’Espagne et de l’Italie. Aujourd’hui, on se soucie plus de la durabilité, y compris pour les produits recyclés et pour les entreprises françaises. Clairement c’est une tendance profitable car plus de gens nous choisissent au détriment des gros joueurs. »

M. Miribel ajoute que même si cette tendance ne se traduit pas encore en résultats chiffrés, les clients ont développé une conscience à leurs activités. « Auparavant personne n’en parlait. Ou plutôt on ne parlait que des prix, des prix et encore des prix. Maintenant on nous parle de l’eau, du transport, des coûts énergétiques et des émissions de CO2. »

n ce qui concerne les segments de marché, avec l’avènement du télétravail, la demande pour le papier hygiénique a légèrement baissé, mais celle pour les rouleaux de papier mains a pris du galon avec le Covid-19. « L’hygiène des mains a la cote avec le Covid, » ajoute-t-il. Et pour les marques privées? « Nous produisons des marques privées dans le marché AFH mais nous développons de plus en plus nos propres marques. La compagnie s’est développée elle-même en aidant les clients à concevoir leur propre marque de papier tissu et leur stratégie de marketing. Ces marques privées demeurent profondément dans notre ADN. »

A travers le marché, il existe toujours une « croissance naturelle ». « Si on nous examine depuis le départ de la MP 1, nous avons toujours connu une croissance de 1000-2000 tonnes par année. Difficile de dire si c’est dû à l’organisation ou si c’est de la croissance pure. Personnellement, je dirais que c’est 50/50. Nous sommes présentement à 45 000 tonnes avec une croissance naturelle annuelle de 1000 tonnes. Aujourd’hui, le fait d’importer des bobines mères d’Espagne, d’Italie … cela coûte cher et ce n’est pas l’option la plus durable. Pas facile de trouver du transport et les clients s’attendent à ce que nous réduisions nos émissions de CO2 imputable au transport. Avec la nouvelle MP 2, nous visons une croissance annuelle de 2000 tonnes/année sur cinq ans. »

Alors que l’entreprise se concentre sur les produits AFH, M. Miribel dit voir une croissance annuelle de plus de 2% pour les produits en papier tissu AFH. La demande est également robuste pour les rouleaux de papier essuie-mains depuis le Covid-19 ainsi que pour le marché français des marques privées.

Et face à l’inflation? … Comment se débrouille l’entreprise? « C’est un cauchemar, répond-il. La racine du problème est que nous sommes dans ce tunnel inflationniste depuis presqu’un an maintenant. C’est bien au-dessus du niveau de stress. Nous devions assumer des coûts énergétiques de 2,2 millions d’euros en 2021 et l’an prochain la facture tournera dans les 12 millions d’euros, peut-être plus. A cela nous devons ajouter le coût d’acquisition de la pâte … »

Ainsi la compagnie a ajusté ses prix plusieurs fois au cours des 12 derniers mois pour pallier aux hausses successives des prix de l’énergie et de la pâte. « Ces augmentations ont sévèrement atteint notre profitabilité et nos marges ont fondu. Notre stratégie consiste présentement à juguler le tout en produisant localement pour réduire nos frais de transport.

Les distributeurs AFH pour la plupart ont accepté et encaissé ces augmentations de prix. « Il reste beaucoup d’incertitude quant à la stabilité des prix. Nous devons faire attention avec l’hiver qui arrive puisque nous ne connaissons pas la portée de la crise énergétique qui a un impact direct sur tous les papetiers. »

M. Miribel conclut que si le gouvernement français ne subventionne pas assez les entreprises comparativement à l’Espagne, par exemple, et qu’elle doit opérer dans la situation actuelle, il y aura clairement une importante perte de compétitivité. « En clair, le papier hygiénique doit être produit localement, rien qu’en terme d’énergie. Nous espérons tous que la guerre en Ukraine cesse et que la croissance naturelle des affaires augmente de 1 à 2% en Europe. Sinon il y aura pénurie en termes de quantités. Je ne crois pas qu’il soit bon d’acheter de pays éloignés avec les coûts de transport prohibitifs et les émissions de CO2. Voilà pourquoi nous avons investi dans une MP 2. Nous serons la première usine à avoir une hotte électrique et cela est très important pour nous. »

Il ajoute que même si la profitabilité de la compagnie a été atteinte de façon directe, on enregistre tout de même un BAIIA dans les deux chiffres, en progression de 10% au lieu de 20%. « C’est tout de même satisfaisant dans les présentes conditions de marché. Durabilité, production locale et qualité des produits … voilà les clés. La stratégie pour nous demeure d’agir localement et de façon durable. »


MP hygiène est le plus important fabricant français de papier d’essuyage en pure ouate labellisé Origine France Garantie®, et également fabricant d’essuyage non-tissé, de savons et solutions pour l’hygiène des mains.

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