Dans l’industrie des pâtes et papiers, atteindre la carboneutralité est un objectif ambitieux, mais de plus en plus pressant.
Ce défi reflète le rôle crucial que joue le secteur dans la lutte contre les changements climatiques à l’échelle mondiale.
La carboneutralité vise à équilibrer les émissions nettes de dioxyde de carbone générées à chaque étape de la fabrication — de la récolte des arbres à la transformation des fibres et à la livraison des produits finis — pour atteindre un impact carbone nul. Cet équilibre est essentiel pour réduire l’empreinte environnementale du secteur tout en répondant à la demande croissante en emballages et produits en papier durables.
Au cœur de cette transition se trouvent deux leviers majeurs : l’énergie et les matières premières. Historiquement, les usines de pâtes et papiers dépendent fortement des combustibles fossiles (charbon, gaz naturel, pétrole) pour alimenter des procédés complexes tels que la fabrication de la pâte, le blanchiment, le séchage ou la finition du papier. Pour tendre vers la carboneutralité, ces sources doivent être progressivement remplacées par des énergies renouvelables.
Certaines entreprises, comme Suzano, misent sur la biomasse, tandis que d’autres, comme l’usine de Port Hawkesbury, adoptent l’hydroélectricité ou l’éolien. Cette transition permet non seulement de réduire les émissions de gaz à effet de serre, mais aussi de valoriser le cycle naturel du carbone propre aux forêts.
La gestion responsable des forêts est un autre pilier essentiel. Les arbres captent naturellement le CO₂ atmosphérique durant leur croissance. Lorsqu’ils sont récoltés de manière durable, ils peuvent être replantés, assurant un puits de carbone constant. Ce cycle naturel constitue un avantage clé des industries à base de fibres.
C’est pourquoi de nombreuses entreprises mettent de l’avant des certifications reconnues telles que le FSC (Forest Stewardship Council) ou le SFI (Sustainable Forestry Initiative), garantissant que les fibres proviennent de forêts bien gérées, renouvelables, et favorables à la séquestration du carbone.
Malgré tous ces efforts, certaines émissions sont inévitables, en raison des limites actuelles des technologies ou des processus eux-mêmes. Pour combler cet écart, l’industrie investit dans des stratégies de compensation carbone : projets de reboisement, captage de méthane, ou encore technologies de captage et stockage du carbone (CCS), à l’image des solutions développées par Svante. L’achat de crédits carbone permet aussi de compenser les émissions résiduelles en finançant des initiatives environnementales.
Parallèlement, les papetières innovent dans la conception de produits et la gestion des déchets, en adoptant les principes de l’économie circulaire : augmenter la part de fibres recyclées, réduire la dépendance aux fibres vierges, et valoriser les résidus de bois comme source de bioénergie ou matières premières pour des bioproduits — une approche mise en œuvre par Votion Biorefineries.
Les matériaux biosourcés émergents, comme les nanocristaux de cellulose ou les adhésifs à base de lignine, présentent un double avantage : ils émettent moins de carbone que les matériaux pétrosourcés, tout en stockant le carbone dans des produits durables. Cela prolonge le cycle de séquestration au-delà de la forêt.
La route vers la carboneutralité est complexe. Elle exige des investissements majeurs, une innovation constante et une transformation systémique. Mais dans un contexte de réglementation climatique de plus en plus stricte et de demande accrue pour des produits écologiques, cette évolution devient bien plus qu’un devoir de responsabilité. C’est un enjeu stratégique pour assurer la résilience et la pertinence de l’industrie dans l’économie de demain.